20 décembre 2015
« La langue propre qui nous est donnée en partage aujourd’hui […] l’un de ses grands défauts – il y en a plusieurs –, c’est d’être dans un continuum, c’est-à-dire qu’il n’y a plus d’arrêt, il n’y a plus de silence dans la langue. Or, comment voulez-vous qu’il y ait un sens supplémentaire au mot qui est entendu, une plus-value de sens, s’il n’y a pas de silence, s’il n’y a pas la résonance possible du mot ?
La résonance, c’est la polysémie qui arrive, les autres sens possibles du mot.
Si on est dans la rapidité, on n’entend du mot que le sens premier, celui du dictionnaire, et donc on est dans une raréfaction du sens du réel. Et on est dans le mensonge.
Qu’est-ce qui fait la poésie ?
La poésie remet du silence dans la langue ; le poème naît d’un rythme (qui est l’essence même de toute poésie) imprévu dans la langue. La poésie, comme disait Aragon, exige "la révolte de l’oreille" ; lorsque l’oreille se révolte, elle écoute ! Tous les jours, nos oreilles entendent sans écouter. On entend de la langue mais il ne se dit rien. On nous dit qu’il va faire chaud ou froid, mais il suffit d’ouvrir la fenêtre ! » ((Jean-Pierre Siméon)