LES MOTS SONT UN ESSAIM EN QUÊTE D’UNE REINE
If I don’t write to empty my mind, I go mad.*
Lord Byron
* Si je n’écris pas pour me vider l’esprit, je deviens fou.
Si j’écris, c’est pour entendre et t’obéir, toi l’hôtesse de mes saisons ; pour te dire, comme oiseau, avec toutes les voyelles. Pour écouter en ton idiome tes mots leurs modulations intonations vibratos. Je persiste dans ma vénerie : un ricochet de résonances, avec, pour horizon, vagues et scintillements. Si tu me prêtais tes mots, mes doigts courant sur le clavier déferleraient bien mieux qu’un suaire entre nous. Je compose dans cette ombre qui, parfois, éteint ton sourire ; rédige, noir sur blanc, tes clairs-obscurs dans un dialecte d’ermitage. Plus je quête mes vocables, plus je distingue le timbre de ta voix et peux, ainsi, te murmurer.
M’accorderais-tu les mots, j’en façonnerais, sur le ciel de ton lit sur celui de tes nuits, des formules si lumineuses que le soleil se voilerait pour ne pas les effacer. Puis je suivrais tes pieds sur un réseau de sentiers du maquis, tes jambes colonnes douces hanches dansant parmi les rangs de ceps. Je répéterais ton dire, ces bras fougères et duvet. Les mots venant de toi ruisselleraient de ta langue à la mienne comme salive lors de fêtes.
Ta parole, mon hôtesse, est un frisson, feuilles de saule ou de peuplier, bruissement de rivière ; ton haleine un peuple d’ailes, de cuisses, de toisons, de parfums verts et triomphants. Tu parles la splendeur dans l’herbe, non un cafouillis, des gravats où coexisteraient plâtres et soleils.
Ta parole ? Gage vivant que maintes nymphes n’ont pas fui.